Plus de 28 mille morts, sans compter les disparus dans les décombres, enfouis sous terre, Gaza est un tas de ruines. Les Palestiniens ont quitté leurs foyers du nord, se sont retrouvés coincés au terminal de la ville de Rafah, ils n’ont plus de destination, ni d’horizon. Netanyahou leur intime l’ordre de revenir en arrière, à travers un couloir sécurisé, de là où ils sont partis. Mensonge. Puisque dans le même temps, il déclare : «Seule la poursuite de la pression militaire jusqu’à la victoire permettra de libérer tous nos otages dans la bande de Gaza». Il faut souligner que Netanyahou, dos au mur, n’a d’autre choix que la fuite en avant, il fonce donc dans la guerre et fait tout pour la perpétuer, il rêve d’en sortir vainqueur pour rester au pouvoir et échapper à la justice (il est poursuivi pour trois affaires de corruption). De plus, sa chance d’être réélu est quasi compromise, elle diminue de jour en jour. Aux derniers sondages, de 15 à 20% d’Israéliens souhaitent son maintien au pouvoir, tous les autres attendent sa mort politique ; 4% seulement estiment qu’il est l’homme de la situation.
Sourd à tous les appels, indifférent à l’opinion internationale, Netanyahou affirme fièrement que son armée a mené une série de bombardements sur Rafah, dernier refuge pour 1,4 million de Palestiniens. Ces raids nocturnes ont fait plusieurs dizaines de morts. Quelque 550.000 personnes se retrouvent face à une insécurité alimentaire catastrophique, déplore l’agence de l’ONU pour l’alimentation et l’agriculture (FAO).
Les Palestiniens n’ont qu’une issue, fuir les bombardements, mais fuir vers où ? Revenir au nord, mais Netanyahou, partisan de la terre brûlée, est passé par là: le nord est dévasté, les maisons sont détruites. L’Europe, excédée par les abus d’Israël, bouge: tout en réalisant les dangers qui l’attendent en mer Rouge : «Soyons clairs, les gens qui se trouvent à Rafah se sont souvent déplacés quatre, cinq ou six fois avant d’arriver là, ils n’ont nulle part où aller», a déclaré David Cameron, chef de la diplomatie britannique. Et de conseiller à Israël de s’arrêter et de réfléchir sérieusement avant de prendre d’autres mesures.
Josep Borrell, le chef de la diplomatie européenne, suggère au président Biden de fournir moins d’armes à Israël. Naïveté et vœu pieux, parce que le président américain soutient et soutiendra sans nuance son protégé Netanyahou, même si les blocages du chef du gouvernement israélien deviennent un problème sérieux pour Washington. Alors que les hauts responsables du monde s’inquiètent des déclarations de Netanyahou, Biden se fend d’un rappel concis : il faut protéger les civils à Rafah». Rappelons qu’une longue amitié lie les deux hommes : en 2014, déjà, devant la Fédération juive d’Amérique du Nord Biden résumait leur relation : «C’est un ami depuis plus de trente ans. Je lui ai écrit «Bibi, je ne suis d’accord avec aucun de tes propos mais je t’aime». On voit par là que le président américain est fidèle à ses amitiés, mais coupable face à ses principes de justice et de probité.